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ntre le 19 janvier et le 9 mars, Callas reprend Traviata à la Scala dans la production historique de Luchino Visconti. Les réactions de la presse, négatives la saison précédente, sont loin. Virage à 180 degrés. Ce qui avait choqué, par exemple lorsque Violetta lance par-dessus tête ses chaussures et entame le célèbre " Sempre libera ", est devenu une idée géniale... Le triomphe est tel que la Scala affiche à nouveau Callas dans l'opéra de Verdi du 5 avril au 6 mai. Cette année-là, Callas interprète l'opéra de Verdi dix-sept fois à Milan. Un record qui reste à battre.

Durant le mois de février, Callas alterne la Traviata avec le Barbier de Séville, troisième et dernier rôle rossinien de sa carrière. En dépit de toute l'intelligence musicale de Callas, la fraîcheur de la nature de Rosine lui échappe. Trop agressive, elle accapare la scène comme l'action, et la presse l'accuse de chanter Carmen ! Il est vrai que le Barbier n'est pas un opéra de prima donna. Elvira de Hidalgo, présente, dira: " En aucune façon ce rôle ne convient à Maria. " Le chef d'orchestre Carlo Maria Giulini accusera, lui, l'ensemble du spectacle d'avoir manqué de répétitions. Dégoûté, le maestro ne dirigera plus d'opéra à la Scala, et fort peu dorénavant. Au lieu des œillets rouges, Callas reçoit avec un aplomb superbe, au moment des saluts, quelques bottes de radis!

Après quelques Lucia à Naples en mars, entre les représentations du Barbier, Callas répète un opéra de Giordano. Elle prépare conscien-cieusement comme toujours Fedora. Pour la mise en scène, la Scala a choisi une actrice célèbre : Tatiana Pavlova. Avec elle, Maria étudie la technique de l'école russe d'art dramatique. Avant même la première, jaillit dans la presse une controverse : Maria n'est pas faite pour ce répertoire. Fedora n'est-elle pas le fer de lance des Tebaldi et autres Caniglia ?

Le chef d'orchestre Gianandrea Gavazzeni répondra lui-même aux accusateurs au lendemain de la première: " Il y a ceux qui pensent que l'art de Callas ne convient pas à la déclamation vériste. Il y a ceux qui pensent que Callas ne peut ni soutenir une ligne vocale si peu chantante, ni une orchestration aussi lourde. Maria, je pense, vient de prouver le contraire ! " Le public aussi. Le destin tourmenté de cette fière princesse russe, inspiré de la pièce de Victorien Sardou, est accueilli triomphalement. En l'absence de la bande de retransmission radio, perdue, les photos qui subsistent témoignent que le spectacle fut élégant et Callas superbe, la taille toujours très ajustée. Franco Corelli, partenaire de Maria, confirme : " Fedora aurait pu êre filmé, tout était parfait! "

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Mais sa saison à la Scala achevée, l'impression est que le cru est globalement moins bon et Callas est heureuse de retrouver Karajan à Vienne, au Staatsoper, pour trois triomphales Lucia en juin. Après un repos d'un mois, Maria retrouve Milan et Karajan pour enregistrer le Trouvère début août.

Elle enregistre ensuite la Bohème, l'opéra de Puccini qu'elle ne chantera jamais à la scène, et Un bal masqué de Verdi qu'elle n'a pas encore interprété à la scène. Ces deux enregistrements sont confiés à la baguette d'Antonino Votto, Serafin étant tombé en disgrâce lorsqu'il accepta de diriger l'enregistrement de la Traviata pour EMI avec la soprano Antonietta Stella, puisque Callas, par son ancien contrat avec Cetra, ne le pouvait...

Après Vienne et le rendez-vous Karajan, ses débuts au Metropolitan doublés d'un retour à la ville natale sont sans conteste pour Callas l'événement majeur de cette saison. Rudolf Bing, le directeur du Met, venu l'entendre lors de son séjour à Chicago, a cédé. Il brise pour elle la règle du Met qui stipule qu'aucun contrat ne peut dépasser les 1000 dollars de l'époque pour une représentation. Après Chicago, en dépit des problèmes causés par Bagarozy à Chicago, Maria est devenue la chanteuse la plus célèbre et la plus chère des États-Unis. Dans Cinq mille nuits à l'opéra, son livre de Mémoires, Bing rapporte comment, pour éviter d'éventuelles saisies sur les cachets de la diva, l'argent de chacune des onze représentations prévues - cinq Norma, deux Tosca, quatre Lucia - est versé en liquide à Meneghini.

Callas à New York.
Le bureau de location est assiégé malgré un article particulièrement hostile du magazine Time, avide d'étaler les scandales. La revue accuse -entre autres - la star de laisser mourir sa mère de faim. Donner à un public puritain une image aussi nuisible de sa personnalité n'est pas sans conséquence. C'est Maria Callas le phénomène -le monstre que le public vient voir, plus qu'entendre un opéra ! Le climat de la ville à l'automne, la tension nerveuse dans la salle, sa propre nervosité, les vacheries des collègues -Zinka Milanov fait son entrée durant la représentation - ne constituent pas un cadre idéal pour l'art. De plus, Maria n'est pas au mieux de sa voix et les productions poussiéreuses du Met ne l'enthousiasment pas. Après une première partie difficile, au deuxième acte, la force et la majesté de la soprano l'emportent et le public succombe. Seize rappels pour Callas le soir du 29 octobre, pas mal! Le chroniqueur du quotidien New York Times précise: " Sa voix qui intrigue donne la sensation d'être forgée à coup de volonté plutôt que d'être un don de la nature. "

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